Révolte populaire contre la corruption, heurts quotidiens avec les forces de l’ordre, dette abyssale et chômage record… Le contrat social semble être rompu dans le pays du Cèdre, qui connaît depuis plusieurs semaines une situation chaotique.
Une démission, deux explosions et des questions
Lundi, Nassif Hitti, le chef de la diplomatie a démissionné en évoquant la transformation du Liban en “État failli”. Une expression lourde de sens pour le pays du Proche-Orient, qui s’est reconstruit au prix de lourds sacrifices, à partir de 1990, après 15 ans de guerre civile.
Mais le lendemain du renoncement du ministre, un dépôt de nitrate d’ammonium a explosé sur la zone portuaire de Beyrouth et deux champignons toxiques se sont hissés dans le ciel. Laissant plus de 100 morts, plusieurs milliers de blessés, jusqu’à 300.000 sans-abri, la ville détruite… et beaucoup d’interrogations, après ce coup de grâce pour la situation libanaise, déjà éminemment critique.
Alors cette question de la déliquescence de l’État, soulevée par l’ex ministre des Affaires étrangères se pose avec plus d’insistance encore.
Le Liban, État failli ?
On se souvient, il y a quelques mois, qu’au plus fort de l’épidémie de Covid-19, des foules denses manifestaient dans les rues de Beyrouth, alors même que la France était encore confinée. Ces images de libanais bravant le danger sanitaire pour dénoncer la corruption et une pauvreté inédite, montraient bien l’urgence de la situation, dans un pays divisé et pris en otage par l’incurie de ses responsables.
Car c’est bien là le problème. Une population délaissée qui ne fait plus confiance à sa classe politique, gangrenée par la corruption. Résultat ? Tout une nation qui plonge peu à peu dans l’abîme, entre infrastructures qui tombent en ruine, et réformes inexistantes.
Le marasme dans lequel se sont trouvés les hôpitaux de la capitale après la catastrophe du port en dit d’ailleurs long.
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L’espoir d’un nouveau souffle ?
À l’heure où de plus en plus d’habitants fuient le pays, beaucoup de Beyrouthins semblent pourtant vouloir croire à un avenir meilleur, évoquant l’histoire d’un peuple qui s’est toujours relevé. Pour cette reconstruction, le pays peut compter sur l’aide matérielle et financière qui afflue des quatre coins du monde et notamment de France, avec laquelle il partage d’étroits liens stratégiques et culturels.
La venue au chevet du Liban d’Emmanuel Macron, assez critique vis-à-vis des responsables politiques locaux, est d’ailleurs un signal fort pour la population, moins de 48 heures après le drame.
La crise que traverse le pays “implique une responsabilité historique des dirigeants en place”.
Mais au-delà de la réponse d’urgence, les lendemains de cette énième crise seront-ils l’occasion de jeter les bases d’un nouveau pacte social, et plus largement, de donner un nouveau souffle au Liban ?
En tout cas, ce qui est sûr, c’est que les libanais sont déterminés à demander des comptes aux autorités pour connaître les raisons de ce terrible drame.