Après les baguettes, on sort les fourchettes, puis les couteaux… et les rames. Ce jeudi, à Bercy, les représentants de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih) venaient défendre leur bout de gras. Confrontés à une hausse vertigineuse des coûts des matières premières et de l’énergie, les cris de détresse des restaurateurs viennent désormais faire écho à ceux que poussent les boulangers depuis décembre.
Face à des factures qui sont souvent multipliées par 7, voire par 12, les témoignages d’artisans étranglés par l’explosion de leurs charges essaiment d’un bout à l’autre du territoire.
Urgence déminage
Fin décembre déjà, l’air grave, le président de la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie (CNBPF), Dominique Anract, avait appelé les consommateurs à accepter de payer quelques centimes de plus leur sacro-sainte baguette pour sauver les artisans. Alors, forcément le sujet devient éminemment politique, voire même inflammable, à l’orée d’un mois qui s’annonce comme celui de tous les dangers pour le gouvernement.
Bien au-delà d’une simple spirale inflationniste, il y a urgence. Urgence à endiguer un incendie qui couve et pourrait rapidement s’embraser. Et gare au mégafeu social ! Alors que l’impopulaire réforme des retraites doit être présentée le 23 janvier en conseil des ministres, le cocktail promet d’être détonant. C’est donc la “pompière” ministre, Elisabeth Borne en personne, qui a pris la parole cette semaine, annonçant, à la hâte, des mesures “inédites” pour les boulangers, détaillées par les ministres Bruno Le Maire et Olivia Grégoire, en charge respectivement de l’Économie et des PME et de l’artisanat.
“Quoi qu’il en coûte”, stop ou encore ?
Au menu : report du versement de leurs charges fiscales et sociales, étalement du paiement des factures, possibilité de résilier leur contrat de fourniture d’énergie en cas de “hausse prohibitive”. Une manière de calmer le jeu pour l’exécutif, en faisant aussi porter la charge sur les fournisseurs d’énergie. En tous cas, les restaurateurs et les autres PME lorgnent désormais sur ces dispositifs pour l’heure réservés à la boulangerie. C’était tout l’objet de la réunion de ce jeudi.
Le gouvernement semble tenté de courir après chaque étincelle pour éviter une contagion à de nouveaux secteurs, au risque de la dispersion. Les artisans ne sont pas totalement convaincus : c’est “reculer pour mieux sauter”, tancent déjà certains d’entre eux. Ils attendent que l’Etat délie les cordons de la bourse, et les subventionne directement.
Une gageure, alors que Bruno Le Maire persiste et signe ce mercredi sur France Inter, un brin bravache : « Nous ne rouvrirons pas un quoi qu’il en coûte pour toutes les professions de France et de Navarre ». Le pari sera-t-il tenable à court-terme ? Une manifestation est d’ores-et-déjà programmée dans la capitale le 23 janvier prochain.