Le montant de l’amende n’est pas mirobolant. Mais la condamnation de TikTok le 29 décembre dernier par la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) est une première en France. Dévoilée jeudi, la décision vient sanctionner la politique de gestion des cookies du réseau social chinois, ces traceurs numériques qui visent à récolter des données personnelles.
Selon la directive européenne ePrivacy, qui s’applique depuis 2021, ils doivent faire l’objet d’un consentement « libre, spécifique, éclairé, univoque » et révocable « à tout moment » de la part des utilisateurs. Mais l’autorité indépendante a constaté que ce n’était pas le cas sur le site web tiktok.com. Les internautes « ne pouvaient pas refuser les cookies aussi facilement que les accepter et n’étaient pas informés de façon suffisamment précise de [leurs] objectifs », précise la CNIL.
« Accélération des condamnations »
Depuis 2018 et sa montée en puissance dans l’Hexagone, le réseau social est pointé du doigt pour sa gestion des données personnelles et du respect de la vie privée. L’enjeu est de taille : TikTok caracole en tête des applications les plus téléchargées en 2022. Et elle est réputée « beaucoup moins regardante » quant à la protection des utilisateurs que ses homologues de la Silicon Valley, rappelle Romain Badouard, maître de conférences à l’université Paris Panthéon-Assas et spécialiste des questions de gouvernance de l’Internet. Alors, « les pouvoirs publics commencent à taper du poing sur la table. », analyse-t-il.
Opération séduction
Pour l’enseignant-chercheur, « cette amende s’inscrit dans le paysage du retour des États au centre du jeu. Depuis quelques semaines, on constate une accélération des condamnations. ». Facebook ou encore Apple se sont ainsi vus infligés de lourdes sanctions à travers l’Europe. Il faut dire que cette année verra pour les géants du Net la mise en œuvre du Digital Services Act (DSA), règlement européen qui prévoit « de nouvelles règles dans la relation États-plateformes, et notamment davantage de normes de transparence. »
TikTok se voit donc forcé à rentrer dans le rang. Son PDG, Shou Zi Chew, était mardi en opération séduction à Bruxelles, alors que l’application, déjà accusée de provoquer l’addiction des adolescents, reste sous le feu des critiques face à des accusations d’espionnage.